Le Maroc me paraissait loin et difficile

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L’abstrait est une constante dans son travail, il exploite l’interrelation entre différentes couleurs qu’il classe par tonalité. L’artiste a choisi un langage visuel en formant des compositions qui figurent indépendamment des références visuelles classiques. Pour lui, l’art est une science et une recherche permanente. Chaque toile est différente et exprime un instant ou une période vécus. L’une des composantes majeures de son travail est la lumière qui n’est autre que celle du Maroc.

e-taqafa : Comment composez-vous votre toile ?

Mohammed Ouammi : Deux éléments sont importants dans la composition de ma toile : ce que j’ai étudié et ce que j’ai laissé au hasard. Je compose la toile en organisant les couleurs mais la composition est plus importante que le choix des couleurs. L’essentiel est que je sois satisfait de la toile, peu importe son esthétique. Je laisse aussi au public la liberté de recevoir l’œuvre, comme il le souhaite, je n’essaie pas de lui plaire ou de le manipuler. La beauté de la toile n’est pas primordiale pour moi.

e-taqafa : Pourquoi diversifiez-vous les techniques utilisées?

Mohammed Ouammi : L’art est une étude, une science et une recherche et non un travail d’artisan. Je ne me concentre pas sur une technique précise, j’utilise le plastique, le bois et ce, suivant une recherche. Des fois on me demande si une toile est biologique et si elle peut être accrochée dans tel ou tel endroit, pour vous dire que l’art plastique est devenu une science. Chaque année une nouvelle technique voit le jour. J’utilise le bois souvent car je me considère spécialiste en cette matière.

e-taqafa : Avez-vous des thèmes de prédilection ?

Mohammed Ouammi : Non je n’ai pas de thèmes permanents mais les thèmes suivent l’instant présent. Je dis souvent à mes étudiants que mes toiles reflètent mon état d’esprit, dans une période précise. Chaque toile a une relation étroite avec moi. Quand je suis au Maroc je réalise souvent des séries en lien avec sa nature. Si vous voulez savoir quelque chose sur moi, regardez mes tableaux.

e-taqafa : Qu’avez-vous gardé de votre expérience à l’Ecole des beaux-arts de Tétouan ?

Mohammed Ouammi : J’ai vécu une période courte à cette école. C’est en Europe que j’ai découvert de nouvelles expériences, où j’ai été influencé par de grands artistes.

e-taqafa : Qui sont les artistes allemands qui vous ont marqué ?

Mohammed Ouammi : J’ai été très marqué par les artistes allemands, par leurs méthodes modernes et par leur liberté, et notamment par l’artiste Gerhard Richter qui était le directeur de l’Académie de Düsseldorf. J’ai appris avec lui qu’aucune toile ne ressemble à une autre et que chaque toile doit être nouvelle ou unique. J’ai invité aussi beaucoup d’artistes allemands au Maroc et nous avons partagé des expériences humaines.

e-taqafa : Et le Maroc est-il présent dans vos toiles?

Mohammed Ouammi : Bien sûr. Mes toiles mettent en exergue la nature du Maroc. La lumière de mes toiles est celle du Maroc, en Allemagne, nous n’avons pas cette lumière. Il s’agit en effet d’une composante importante dans mon travail, comme le sont la profondeur, les premiers plans et les dimensions.

e-taqafa : Qu’en est-t-il des couleurs, comment se fait leur choix ?

Mohammed Ouammi : Je fais mes propres mélanges de couleurs, je n’utilise jamais des produits chimiques. Sur un tableau en verre, je prépare différents degrés de bleu, de rouge ou de jaune et je fais par la suite mon choix.

e-taqafa : Le choix du bleu a-t-il un sens?

Mohammed Ouammi : Oui, c’est ma couleur préférée. Le bleu a une grande influence sur la vie des gens et sur la mienne, c’est la couleur du calme, de la sérénité, de la relaxation. Je peins souvent pour me relaxer d’où sa prédominance dans mes tableaux.

e-taqafa : Que représente pour vous ce retour au Maroc et à l’Espace Rivages?

Mohammed Ouammi : C’est ma première exposition professionnelle au Maroc. J’ai exposé dans le British Museum, le plus important musée du monde mais je reste un artiste inconnu au Maroc. Qui aurait pu me proposer une telle occasion à Rabat ? Exposer au Maroc me paraissait loin et difficile mais cette exposition m’a redonné l’espoir, c’est un grand plaisir pour moi. Merci. 

Propos recueillis par Fatiha Amellouk pour e-taqafa.ma