Mouna Karimi

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La cinéaste-chercheuse Mouna Karimi s’est frayée son propre chemin dans le monde cinématographique dans son pays d’origine, le Maroc, avant qu’elle n’immigre en France, précisément à Marseille, pour continuer son aventure artistique. Actuellement, elle mène ses études doctorales à l’Université Aix Marseille, parallèlement à ses projets artistiques.

E-taqafa : Pourquoi avoir choisi la production documentaire ?

Mouna Karimi : C’est venu de manière progressive. Je me suis orientée vers la réalisation documentaire au moment où je devais faire le choix entre la fiction et le documentaire. En plus, au fur et à mesure que j’effectuais mes stages, j’ai réalisé que le documentaire m’attirait le plus. La recherche d’un sujet, la mise en lumière d’une histoire, l’art de la raconter, les relations humaines…, tout cela se rapporte aux thématiques sur lesquelles j’ai travaillé, comme la mémoire collective ou historique, les histoires de vie personnelles, etc. Après mon master de réalisation de documentaire, j’ai compris que le volet de la production était nécessaire, car il ne s’agit pas seulement de financer un projet mais d’accompagner son porteur.

 E-taqafa : Vous êtes actuellement basée à Marseille. Quels liens maintenez-vous encore avec le Maroc ?

Mouna Karimi : Marseille n’a pas été un choix hasardeux, la communauté artistique marocaine y est très présente. À la base, je me suis installée à Marseille pour poursuivre ma thèse qui porte sur le Maroc et dans le cadre de laquelle j’étudie la mise en scène des représentations des femmes au sein du cinéma marocain, en observant notamment les constructions identitaires, les clichés et stéréotypes, ainsi que l’histoire des nouvelles formes narratives et de la réappropriation des codes esthétiques et symboliques par les cinéastes.

E-taqafa : Vos réalisations et travaux illustrent-ils ces liens ?

Mouna Karimi : Parfaitement ! Puisque la majorité de mes travaux mais aussi de mes actions collaboratives et participations ont un lien direct avec le Maroc, notamment avec ses champs culturels et artistiques. Je suis chanceuse d’être issue d’un pays qui a tant à donner et à partager. Je suis en outre fière d’appartenir à une génération qui peut à la fois puiser dans sa marocanité et s’inspirer du reste du monde dans ce qu’il a de bon à nous apporter pour construire le Maroc de demain, et c’est justement dans cette optique que je construis mes projets.

E-taqafa : Quels sont les sujets que vous traitez dans vos productions ?

Mouna Karimi : Depuis quelques années, je me concentre essentiellement sur des thématiques sociales se rapportant aux femmes au sein de la société marocaine, aux traditions et aux coutumes, à la famille et à la société, au quotidien et aux inégalités qu’elles peuvent rencontrer, mais aussi aux parcours peu connus de bon nombre d’entre elles. Ces femmes qui ont réalisé de grandes choses et qui ont eu, entre autres, un impact sur le domaine artistique. Par ailleurs, je m’intéresse énormément à la relation au corps et à l’individualité, puisque la société marocaine fonctionne encore selon un modèle de représentation de groupe.

E-taqafa : Pourquoi vous êtes-vous spécialisée dans ces thématiques ?

Mouna Karimi : Car nous sommes encore peu nombreux et nombreuses à traiter de ces thématiques en suivant une démarche de recherche artistique appropriée, tout simplement. Lorsque j’ai commencé ma thèse, j’ai eu beaucoup de mal à trouver des travaux récents autour des thématiques liées à la représentation des femmes dans le cinéma marocain. Ce qui était disponible, c’étaient des travaux sur le cinéma maghrébin dans sa globalité géographique. Pourtant, je pense que c’est une erreur, car le Maroc a des spécificités historiques, culturelles et sociales qui sont particulières par rapport à d’autres pays maghrébins.

E-taqafa : De quoi êtes-vous fière aujourd’hui ?

Mouna Karimi : D’avoir eu la chance de construire ce parcours d’artiste-chercheuse, qui n’est pas facile. C’est un travail qui nécessite beaucoup de persévérance mais qui est tellement stimulant. Aussi, je suis fière d’avoir eu la chance de rendre fière ma famille, surtout ma mère qui représente, à mes yeux, le modèle parfait de la femme. Je suis également très émue et fière d’être une spécialiste du cinéma marocain féminin. Ma carrière dans la recherche en art cinématographique me permet d’avoir un lien d’amour très spécial avec le Maroc. Je suis chanceuse d’être issue d’un pays qui ne cesse de se construire, culturellement fascinant et qui s’impose de plus en plus à travers le monde.