Omar Mahfoudi

Peintre et vidéaste

Image de couverture: 

« Dans la peinture, il y a une sorte de méditation »

Artiste épidermique, passionné par les formes et les couleurs depuis toujours, il devient peintre reconnu pour son travail authentique sur les silhouettes et les états d’âme. Avant la crise sanitaire, il se préparait à présenter ses dernières œuvres à la prestigieuse  Biennale de Dakar prévue en août. Confinement pictural avec Omar Mahfoudi.

 

E-taqafa :  D'où est venue la passion pour l'art ?

Omar Mahfoudi : Tout petit, avec mes amis qui voulaient devenir policiers, avocats ou médecins, j’étais le seul à ne pas avoir de réponse. La seule chose que je voulais faire c'était dessiner. A 17 ans, j'étais davantage passionné par la peinture et l'histoire de l'art que par le foot. Mon père, quant à lui, était peintre en bâtiment et ramenait des brosses, des pinceaux, de la peinture et des nuanciers de couleur à la maison. J'aimais jouer avec tout cela, et ce goût pour la peinture et les formes n'a fait que grandir...

 

E-taqafa : Les visages, voire les formes de visages, sont très présentes dans vos œuvres. Pourquoi?

Omar Mahfoudi : J'ai toujours été fasciné par la peinture abstraite comme pratique et comme gestuelle. Le portrait, je l'envisageais davantage comme un prétexte pour une peinture abstraite même si cela peut sembler antinomique ou paradoxal, je l'avoue volontiers.

 

E-taqafa :  Pourquoi ce mi chemin entre l'abstrait et le figuratif?

Omar Mahfoudi : Les portraits ne représentent pas des personnes que je connais mais davantage des silhouettes, ou plus encore une présence et des émotions, des sentiments, voire carrément des états d'âme. Il y a un côté  mystique dans mon travail. Aujourd'hui, ces portraits sont devenus des paysages qui soutiennent une présence voire une absence, selon les cas, selon les œuvres...

 

E-taqafa :  Comment s'impose à vous le choix de la couleur ?

Omar Mahfoudi : Je fonctionne dans ce cas comme un artiste abstrait. Avant je m'intéressais à la matière avec une palette vive voire fauve. Désormais, je suis fasciné par la tâche liquide de couleurs pastelles.  Je cherche un rendu plus épuré. 

 

E-taqafa :  Il y a un côté street art, peinture des années 80. Quelles sont vos influences ?

Omar Mahfoudi : Déjà je suis né dans les années 80, cela vient peut-être de là. Mais dans mes souvenirs, au niveau des couleurs, je suis plus proche des années 90. En tout cas, j'ai toujours été attiré par les couleurs futuristes, les néons et je n'ai pas vraiment de références street-art ; je me sens plus proche des artistes modernistes en peinture, par la musique et le cinéma aussi. 

Je pense à Picasso, à Basquiat évidemment mais aussi et davantage même, à Cy Twombly, et Bacon. Chez les contemporains j'aime beaucoup le travail de Peter Doig, Françoise Petrovitch et Tala Madani, Marlène Dumas, beaucoup de femmes...

 

E-taqafa :  Il y a la toile puis la vidéo. Comment s'impose le canal, le moyen d'expression chez vous ?

Omar Mahfoudi : Dans la peinture, il y a une sorte de méditation, seul enfermé dans mon atelier. Avec la vidéo, c'est l'inverse, je pars à la rencontre des autres, je les écoute et les regarde. C'est une écriture dans le temps. Ce n'est pas figé. 

 

E-taqafa :   Quand est -ce qu'une toile est considérée comme réussie ?

Omar Mahfoudi : C'est la partie la plus compliquée. Quand s'arrêter. C'est ce qui prend du temps à comprendre et à apprendre dans la carrière d'un artiste.  Ce n'est pas une recette gastronomique, c'est davantage une confrontation pour tendre vers l'équilibre. Il faut être devant une toile et ne plus rien pouvoir y ajouter, ne rien pouvoir faire de plus. C'est le signal de la fin. 

 

E-taqafa :  Comment le confinement et la crise sanitaire ont-ils affecté votre créativité ?

Omar Mahfoudi : J'étais en résidence avant le confinement et pendant la première semaine, à Paris au centre international des récollets. J’ai beaucoup travaillé. J'ai ensuite rejoint ma femme et ma fille et c'était intense ! Entre les repas à cuisiner et la pâte à modeler, pas de place pour l'art au-delà des discussions. Il n'y a pas eu d'espace vide. Mais je m'y remets tout juste et souhaite travailler sur la Nuit. 


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